mardi 24 mars 2009

Écriture automatique

Pars, pars très loin et court dehors

Reviens, reviens et serre moi fort

Pars mais ne me quitte pas je t'en prie

La chaleur me manque en cette nuit

Solitaire au milieu d'un torrent de pluie

Je compte les grains de sable qui coulent

Et les gouttes d'eau sur ma fenêtre froide

Je regarde tes yeux dans le vide

Et ce mur si blanc si pur et pourtant

Si vide et si absent

Je veux être à la hauteur

À la hauteur de toi et du monde

À la hauteur de moi

Mais pourquoi est-ce si ingrat

Pourquoi le silence me tient-il la bouche

Je m'étouffe dans la bile de mes propres mots

Les passes temps autour de moi s'embourbent

Les papiers se chiffonnent et ma tête est lourde

Creusée par les nuits sans fermer les paupières

Mon coeur se fend, mon coeur se fend

Au pied de mes prières silencieuses je m'étends

Et j'espère

Je ne veux que du bonheur

Mais quand donc trouverai-je une aire de repos

Pourrai-je un jour sans crainte

Repartir à nouveau?

lundi 9 mars 2009

Lettre de poesie

Salut Simon, ça fait un bail qu’on ne s’est pas écrit! Tu m’avais conseillé le livre Lettres à un jeune poète de Rilke ainsi que Regards et jeux dans l’espace de St-Denys Garneau. J’ai justement eu l’occasion de les lire dans le cadre de mon cours de poésie et ça m’a fait pensé à toi. Je les ai dévorés avec intérêt et je comprends maintenant pourquoi tu leurs trouvait tant de similarités. Dans les deux ouvrages, nous décelons l’essence même de la poésie qui réside dans les réflexions profondes de ses compositeurs. Les poèmes sont tantôt des émotions couchées sur papier, tantôt des réflexions sur la littérature et ses limites. Les deux auteurs semblent vouloir nous exprimer tous deux les origines de la poésie et les sources principales qui abreuvent ses créateurs. Rilke par exemple dans son livre, nous expose d’une certaine façon sa vie, en partant de l’innocente jeunesse heureuse pour finalement clore avec la sombre vieillesse. St-Denys Garneau quant à lui, cherche à voir plus clair pour définir ce qu’est la poésie et se heurte à un échec. Les deux auteurs semblent nous faire nous questionner à savoir si la poésie peut changer des choses dans le monde. Ce sont là deux ouvrages qui m’ont grandement fait réfléchir.

Dans Lettres à un jeune poète, Rilke nous exprime ses hauts et ses bas en tant que poète. Il parle de son vécu mais également de ses questionnements sur l’acte littéraire. Il maintient que le créateur doit fouiller dans son être, explorer son intérieur pour en extirper les plus grands secrets. Ses émotions sont en quelque sorte, la matière première qu’il doit utiliser pour façonner ses œuvres et l’ordinaire de la vie du poète est une de ses principales sources d’inspiration. « Si votre quotidien vous parait pauvre, ne l’accusez pas ; accusez vous vous-même, dites vous que vous n’êtes pas assez poète pour en évoquer les richesses ; car pour celui qui crée il n’y a pas de pauvreté, ni de lieu pauvre, indifférent. » Ses techniques vont même au-delà des règles traditionnelles de la poésie puisqu’il préfère sortir des sentiers battus. Les cadres selon lui, empêcherait de donner naissance à l’authenticité de la vraie poésie. Aussi, Rilke prône la solitude comme outil de création. C’est d’ailleurs là, le thème le plus courant de son livre. « La solitude est essentielle à la création et à la connaissance de soi. Elle constitue l’essentiel de l’enseignement ». Sans la création, l’auteur ne pourrait pas voyager au plus profond de son être, donc cela fausserait la qualité de ce qu’il écrit. Rilke insiste également sur le fait qu’un poète ne peut pas créer sans souffrance. La citation « Qu’une chose soit difficile doit être pour nous une raison supplémentaire de l’accomplir.» vient appuyer ses dires sur sa façon de percevoir l’art littéraire.

Dans l’œuvre Regards et jeux dans l’espace, l’auteur décrit l’évolution d’un humain à travers ses poèmes qui passent de l’enfance à l’âge adulte. Les titres sont très évocateurs, passant de naïf comme «L’aquarelle» jusqu’à beaucoup plus accablé comme «Le diable pour ma damnation». En effet, on peut facilement déduire par les poèmes de ce livre, l’idéalisation qu’on a du monde lors de l’enfance et qui se dégrade un peu plus à chaque pas qu’il fait vers l’âge adulte. Des poèmes ressortent des extrêmes comme «Est il rien de meilleur pour vous que de chanter les champs, Et vous les arbres transparents, Les feuilles, Et pour ne pas cacher la moindre des lumières, Que l’aquarelle cette claire, Claire tulle ce voile clair sur le papier.» Les mots semblent simples à première vue mais s’avère en réalité très recherchés pour être imagés et enfantins. L’autre extrême nous montre des poèmes plus sombres comme le montre l’extrait ; «Cette soif qui noya Ève, notre mère, Dans le pécher. Juste à peine pour entrevoir, La fascination de la nuit La splendeur du jour éternel, L’étonnante réalité.» L’auteur veut nous dépeindre ici une triste réalité qui nous pousse à devenir plus terre à terre en vieillissant. Peut-être nous invite-il aussi par cette œuvre, à garder notre cœur d’enfant? Quoi qu’il en soit, ses poèmes en apparence simples mais en réalité recherchés dans ses images, m’ont beaucoup touchée. C’est une quête d’identité qui nous mène à voir à quel point l’homme est fragile à l’influence extérieure. On peut d’ailleurs sentir le doute tout au long du livre et de ses poèmes qui sont toujours un peu plus teintés par quelque chose d’un peu plus gris. Cela se termine d’ailleurs par un échec de celui qui cherchait tout simplement à voir plus clair.

Dans les deux cas, les auteurs bannissent le traditionalisme, ce qui fait d’eux des poètes modernes. Ils privilégient tous les deux le travail expérimental, c’est à dire sans réellement se soucier de la forme et des normes de la poésie habituelle. Sans la poésie, les deux auteurs affirment qu’ils ne pourraient pas être heureux, voir carrément pas vivre sans. Sinon les thèmes des deux auteurs sont sensiblement les mêmes, parlant d’amour, de jeunesse, d’enfance et de nature. Ils mettent aussi l’accent sur la solitude et la recherche de soi qui est selon eux la clé pour parfaire leur art. Rilke écrit plutôt en proses tandis que St-Denys lui utilise les vers libres. Dans les deux cas, nous avons affaire à des méthodes qui soutiennent le modernisme des auteurs.

Rilke est un auteur qui privilégie la recherche de soi pour créer des œuvres authentiques et reste un passionné qui maintient que lorsqu’on est un véritable poète, on ne peut vivre sans la poésie. St-Denys quand à lui reste en quête de la vraie poésie et de son sens profond. C’est pourquoi il passera par des chemins hors des sentiers battus pour parvenir à définir son propre style de poésie. Ses deux poètes ont sur laisser leur marques dans les archives les plus lues de notre passé littéraire et je pense bien qu’ils auront influencés à bien les créateurs qui aujourd’hui, ont un éventail de possibilités pour écrire. Merci beaucoup de m’avoir conseillé ces deux livres!

-Sabrina Cloutier-